Du retour des ouvrages invendus : une étude européenne
Le programme RISE Bookselling, et la Fédération européenne et internationale des libraires (EIBF), présentent les résultats de leur première étude sur le thème des retours de livres. Cette initiative triennale est co-financée par l’UE et gérée par l'EIBF. Il vise à développer, renforcer et maximiser les capacités et la résilience du secteur européen de la librairie.
Le 05/05/2023 à 14:38 par Fasseur Barbara
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Publié le :
05/05/2023 à 14:38
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Six mois d’entretiens ont été nécessaires à l’élaboration de cette première étude. Elle porte sur sept marchés du livre : la Lettonie, le Luxembourg, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, la Slovaquie, l’Espagne et la Suède. Le document ainsi obtenu met en lumière le fonctionnement et les modèles respectifs.
Un procédé primordial
La possibilité de retourner les invendus est fréquemment considérée comme une part essentielle du modèle de la vente de livres. Cela permet aux libraires de minimiser leurs pertes tout en investissant dans une large variété d’ouvrages rendus disponibles pour les lecteurs. Défis communs et solutions innovantes sont au cœur des conclusions de cette étude, afin de rendre le processus aussi efficace et durable que possible à l’avenir.
Les systèmes de réexpéditions sont souvent similaires, mais rarement identiques d’un pays à l’autre, d’où l’intérêt d’étudier les différentes manières de faire à travers l’Europe et le monde. Cependant ils soulèvent tous un même problème : celui de la durabilité. En effet, en plus des coûts et du travail additionnel que représente cette pratique, l’impact environnemental est au cœur des débats depuis une dizaine d’années.
Des problématiques communes
Une des problématiques majeures réside dans la gestion des stocks, et l’utilisation des logiciels qui l'accompagnent. Si l’étude montre une bonne répartition des ressources et un accès facilité à ces solutions, elle démontre toutefois une disparité, notamment en lien avec la taille de la librairie. Dit autrement : les grandes chaînes sont plus avantagées que les établissements indépendants qui fonctionnent et s’organisent tous de manière différente. Cela mène les plus petits d’entre eux à une charge de travail accrue et un temps consacré à la logistique bien plus important.
L’autre point noir soulevé par l’étude est la surproduction d’ouvrages. Les personnes interviewées aux Pays-Bas et en Espagne insistent sur ce point, le plaçant comme responsable principale de la majorité des retours dans leurs pays. Pour les néerlandais, la surproduction aurait mené au pilon de plus de 2 millions de livres en 2021, sur les 3 millions qui ont été réexpédiés la même année.
Par ailleurs, les participants à l’étude déplorent le manque de transparence concernant le sort réservé à ces ouvrages. Si la majorité des titres se retrouvent éliminés, il y a aussi peu d'efforts fait dans l’optique de les réintégrer aux différents marchés. Ce taux reste une donnée très floue et peu renseignée par les maisons d’édition, rendant les vérifications difficiles, voire impossibles.
Des solutions plus viables
Le document qui émane des recherches de RISE Bookselling a pris le temps d’étudier la viabilité du modèle économique de l’impression sur demande. Si sur le papier ce dernier semble représenter le moyen de production et de vente de livre le plus durable, il se révèle rapidement peu viable dans la majorité des pays étudiés. Le coût important de cette solution, couplé à ses capacités limitées, en fait un modèle compliqué à appliquer qui ne semble attirer ni les libraires ni les éditeurs.
La piste clé d’amélioration des pratiques réside dans une meilleure communication et coopération des différents acteurs de la chaîne. Un exemple pertinent de cette déclaration qui semble enfoncer des portes ouvertes s’est illustré en Suède. Förlagssystem, distributeur local, travaille en étroite collaboration avec Bokinfo, une base de données statistique en ligne du pays pour rationaliser la digitalisation des retours réalisés par les libraires. Ainsi les plus petits commerces se verraient offrir les mêmes services que les grandes chaînes.
Un dialogue essentiel
Et justement, favoriser le dialogue entre les grandes librairies et les établissements plus modestes permettrait de véritables pas en avant quant à la durabilité des systèmes. Notamment dans la pression que les grandes structures peuvent appliquer aux fournisseurs notamment en matière d’impact environnemental.
De même, pour contrebalancer l’effet de la surproduction d’ouvrage, toutes les personnes interrogées s’accordent sur le fait qu’une sélection plus rigoureuse, tant de la part des libraires que des éditeurs, ne pourrait être que bénéfique. L’étude va même jusqu’à évoquer une approche différente de l’édition et du calendrier éditorial pour aller en ce sens.
En conclusion, l’analyse souligne à nouveau l’importance d’une collaboration étroite entre les différents acteurs de la chaîne du livre. Que ce soit à travers le report de la sortie en poche des ouvrages par les éditeurs pour laisser plus de temps aux grands formats, ou bien en faisant confiance aux librairies pour disposer et éliminer les invendus ou encore laisser cette mission aux distributeurs : tous les acteurs ont un rôle à jouer dans cette conversation.
Crédits photo : illustration - Gülfer ERGİN / Unsplash
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3 Commentaires
tatou
06/05/2023 à 11:40
La question des retours en France est un serpent de mer qui agite périodiquement les esprits, entraînant une compréhensible indignation vite suivie d'un aveu d'impuissance. L'interrogation prend aujourd'hui une coloration nouvelle depuis que la pensée dominante nous demande de ne plus réfléchir qu'à travers le prisme de l'éco-citoyen, vertueux et responsable, qui fait que désormais toute action et tout produit doivent être regardés sous l'angle du développement durable, sauf à subir l'opprobre, et bientôt la casserolade - sans compter les lois nouvelles sur la consommation. S'ajoute à cela que le libraire véhicule l'image d'un passeur d'idées, défenseurs de la liberté, bref confortablement installés du côté du bien (donc à l'abri, lui, de la casserolade !!) - j'en connais qui sont bien loin de cette idyllique peinture. Mais le discours demeure que le libraire n'est pas un commerçant comme un autre (Au bon livre, oui, Au bon beurre, non !).
Métier d'offre et non de demande, sauf dans les secteurs professionnels et techniques, l'édition pour vendre, air connu, doit présenter largement ses produits, technique qu'elle partage avec la presse (les chiffres sont bien plus terrifiants), mais aussi l'habillement, l'alimentaire etc. Le tout se complique par l'existence de la loi sur le prix unique du livre, qui sur ce point précis est un frein à sa résolution.
Faut-il rappeler qu'un librairie est une entreprise comme une autre, et non pas une association de bienfaisance, qui pour ne pas faire faillite doit dégager un profit, ou tout du moins équilibrer son CA et ses coûts ?
Certains (rares) éditeurs ont choisi de ne vendre qu'en compte ferme, ce qui bien sûr limite leurs ventes, mais augmente leurs marges, grâce à des tirages bien moins élevés, et donc des retour quasi infinitésimaux. Le compte ferme trouve sa limite dans le fait qu'il demande surtout que le libraire fasse un vrai travail de sélection de ses commandes, fondé sur la connaissance intime de sa clientèle, puisque sa prise de risque est totale. Pas sûr que la généralisation d'un tel procédé plaise et aux éditeurs et aux auteurs, dont les livres ne seront de facto plus visibles dans un grand nombre de points de vente. Sans compter qu'économiquement, pour l'éditeur, chaque livre est financé par les ventes du livre qui le précède, et gare à la vacillante "économie de la bicyclette" facteur de surproduction : tu ne produis plus, tu tombes.
Mais je m'égare.
Ne pourraient-on pas imaginer que la librairie devienne une sorte de show room (qui existaient par exemple pour le livre scolaire) où les livres seraient présentés à l'unité comme des spécimens, avec un efficace principe de commande et de livraison en compte ferme à la clé, le livre étant alors envoyé par la poste, le libraire étant rétribué sur cette vente pour son service ? L'autre solution, ou son complément, (aie ça va hurler, mais aujourd'hui déjà, pour nombre d'éditeurs, Amazon est un libraire comme un autre, et souvent leur premier client, car rappelons-le, le client de l'éditeur, c'est le libraire et pas le lecteur final) serait de développer un système de type plateforme, mais où le livre serait systématiquement et partiellement feuilletable (peut-être moyennant phynance), commenté par des "libraires" ou des prescripteurs, puis envoyé par la poste ? Car comment se procurer un livre autrement que par la poste quand on habite des régions où il n'y a plus de libraires et où l'utilisation de la voiture est alors indispensable, et à quel prix ? Éco-citoyens, réveillez-vous, et brandissez les fourches !
On finira en rappelant (le simple examen d'une rame de TER le prouve) que la sociologie du lecteur de fiction change, au profit des produits de type Netflix, dont certains font montre d'une qualité et d'une inventivité bien supérieures aux produits d'édition, ou mieux adaptés aux usages de notre temps, ce pour des prix compétitifs par rapport aux prix de vente du livre. Le principe de diffusion/distribution du livre, dans ses équilibres économiques, va immanquablement devoir s'adapter, touchant par là le mode de fonctionnement des libraires et des éditeurs, qui lui n'a pas changé depuis les années 50...
creat1955
11/05/2023 à 17:22
Petit éditeur spécialisé en régionalisme, j'ai décidé, suite au "vidage" des étagères de la FNAC (et autres) dans les quinze jours suivant le premier confinement, de passer en compte ferme à partir de septembre 2020. Certes le CA a un peu baissé, mais agréable surprise, "des" libraires jouent le jeu et pas que sur les nouveautés ! Désormais, mon CA s'équilibre grosso modo entre 50% de vente en librairie et 50% de vente Internet (site, Amazon, E-bay, etc.). Et les ventes internet sont être en quasi totalité des ventes "des champs" tandis que les ventes librairies, elles, sont vraisemblablement des ventes "des villes". Et, entre les tirages offset et le livre à la demande, il y a l'impression numérique qui me permet de commander des réimpressions de chaque titre par multiple de 4, en commençant par 4... paradis de la gestion et du financement des stocks garanti !!!
marie brouns
29/12/2023 à 11:21
Bonjour - Je recherche les 2 tomes sur Napoléon CAMPAGNE DE FRANCE des éditions QUATUOR - Merci